La solitude lumineuse, Pablo Neruda

Publié le : 31 mars 20214 mins de lecture

Court récit autobiographique extrait de J’avoue que j’ai vécu, La solitude lumineuse permet à Neruda de nous livrer les souvenirs de ses années de consul à Colombo, Ceylan, Singapour puis Batavia. L’univers de Pablo Neruda est aussi coloré qu’un marché indien ; on voit clairement la sensibilité de l’écrivain, déjà (il a 23 ans à l’époque), pour les êtres et surtout les femmes, pour les rues et les enfants, pour les rites et les coutumes. Le poète apprend, observe, emmagasine les réflexions. Il s’essaie par exemple à l’opium – sans grande réussite – et cherche à comprendre le regard tranquille des Bouddhas. Au-delà d’un récit autobiographie, c’est un récit de voyage qui nous est proposé. C’est Neruda, âgé, qui écrit ces lignes ; mais nous suivons bien la jeunesse du poète, preuve que son écriture n’a pas pris une ride. La vie de cet homme nous paraît si riche, si colorée, que nombres d’existences pâlissent à sa vue.

Car Neruda est curieux de tout, friand de tout ; c’est d’ailleurs ce trait de caractère qui donne tout son intérêt à l’autobiographie, car le regard de Neruda ne cesse de se poser à droite et à gauche avec une gourmandise inassouvie. Nous le suivons jusque dans le lit des femmes birmanes, dans sa lecture personnelle et poétique de Proust, dans ses vicissitudes dans ses fonctions de consul à Batavia… Le poète nous apparaît comme un homme franc et sympathique(le miracle de l’autobiographie…) dans un monde difficile où colons et colonisés se regardent d’un oeil mauvais. Deux mondes et deux cultures que connaît Neruda ; ce n’est pas son rôle que de trancher et de « choisir un camp », aussi restera t-il « neutre ». De ce fait, solitude et méfiance seront dans les yeux des habitants des deux camps envers Pablo Neruda. Qu’à cela ne tienne, malgré une solitude pesante, l’écrivain possède une mangouste incroyable, Kiria, des livres et quelques femmes. C’est sans doute ainsi que la solitude devient non plus un fardeau, mais une lumière. Un livre tout à fait dépaysant et poétique, doux et drôle.

Quelques citations

« Le poète n’a rien à craindre du peuple. La vie, me sembla t-il, me faisait une remarque et me donnait à jamais une leçon : la leçon de l’honneur caché, de la fraternité que nous ne connaissons pas, de la beauté qui fleurit dans l’obscurité. »

« La rue était ma religion. La rue birmane, la ville chinoise avec ses théâtres en plein air, ses dragons de papier et ses lanternes magnifiques. La rue hindoue, la plus humble, avec ses temples qui constituaient le commerce d’une caste et ses pauvres prosternés au-dehors, dans la boue. Les marchés où les feuilles de bétel s’élevaient en vertes pyramides comme des montagnes de malachite. Les oiselleries, les marchands de fauves et d’oiseaux sauvages. Les rues tortueuses où passaient en ondulant les femmes birmanes, avec à la bouche un long cigare. Tout cela m’absorbait et me plongeait peu à peu dans le sortilège de la vie réelle. « 

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Bio rapide et liens

Pablo Neruda, de son vrai nom Neftali Ricardo Reyes Basaltao, est un écrivain et homme politique chilien.  Né en 1904, il a marqué la poésie par sa voix révoltée et tapageuse face au régime de Franco puis face à la dictature de Videla au Chili.

Lauréat du prix Nobel en 71, il s’éteint en 74. Sa mort reste une question : assassiné par le régime ou perdant le combat contre un cancer?

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